coup doeil sur...

le MENHIR par Charles de MARS

 

Chaque chantier a son image de marque,Celle de LANAVERRE est surtout liée aux innombrables dériveurs de compétition 420,Jets,490, 505 qui, sortis de ses ateliers, sillonnent tous nos plans d'eau.

On peut donc s'étonner de voir les noms de Christian Maury et Lucien Lanaverre figurer sur la fiche technique d'un canot de pêche-promenade ; on peut en même temps s'en réjouir car, après tout, pourquoi ne bénéficieraient-ils pas de l'expérience d'un chantier capable de bien construire des voiliers rapides ?

Quoi qu'il en soit, la silhouette du Menhir ne paraît pas influencée par ses collègues d'écurie.elle est très classique dans le genre.

Sous une tonture nerveuse, la coque, à l'étrave presque droite, est défendue par un bon francbord, dont l'importance est dissimulée par un petit pavois, un solide liston en néoprène et une nervure moulée au milieu de la muraille qui en divise la hauteur.

Le roof, court et compact, ne surcharge pas la silhouette et laisse à l'avant, pour la manoeuvre, une petite plage bien protégée par un pavois et un balcon optionnel. Le cockpit est très vaste il occupe tout le reste de la longueur de la coque et s'étend jusqu'au très large tableau. Il est peu encombré par les coffres ouvrants qui ne le ceinturent qu'en partie et peuvent être réunis par des bancs amovibles.

La voilure, d'une bonne surface, est élégante et élancée. Le mât d'alliage léger, soutenu par un étai et deux paires de haubans, est implanté sur le roof, et soutenu par un arceau. A son pied, un capot à charnière dégage une descente close par une porte démontable et facilite l'accès à une petite cabine très claire où l'on trouve hauteur assis sur une plateforme qui peut recevoir deux matelas.

La cabine fermant à clef, les trois coffres du cockpit pouvant se condamner par des cadenas, il sera possible de loger à bord, en sécurité, un matériel relativement important. Les équipets vide-poches situés près de la descente seront très appréciés.

La stabilité du Menhir est assez extraordinaire et les mains courantes de roof sont très bien placées. Nous nous en sommes aperçu avec joie quand, au moment de l'appareillage, il s'est agi d'étarquer une drisse de foc dont le bas est constitué d'une ligne synthétique d'un diamètre qui nous a paru mieux adapté à la pêche au thon qu'à la manoeuvre d'une voile.

Nous nous étions mis à deux pour la raidir et, au cours de cette opération, douloureuse pour les mains, nous nous sommes trouvé à plusieurs reprises au pied du mât dans le même passavant sans que le Menhir manifeste par une gite exagérée sa réprobation à ce manquement aux bons usages.

La faiblesse apparente des bas de drisse nous a fait, par ailleurs, renoncer à une prise de ris par un temps qui l'aurait largement justifiée.

Signalons aussi, à ce propos, que les axes qui assurent la liaison entre les haubans et les lattes sont trop courts. Il faut tordre ces dernières pour pouvoir remettre ces axes après avoir glissé à leur place les manchons qui ferment les cosses des haubans.

La manoeuvre de la dérive est facile; elle est tenue par une simple chaînette, terminée par une poignée en bois (un peu fragile) ; celle du safran relevable est enfantine.

Il soufflait un gros " cinq " pour notre première sortie et, faute d'oser réduire, à cause de la drisse, nous portions voilure entière. Nous avons ainsi constaté que la stabilité du Menhir au mouillage se confirmait sous voiles. Il inspire autant confiance que ses cousins quillés et porte allégrement sa toile. Comme tous les bateaux larges, il nous faisait payer en ralentissant la gite excessive que nous lui imposions mais grimpait bien au vent et marchait même de façon étonnante au plus près si nous prenions la peine de le soulager en travaillant l'écoute de grand'voile. Cette manoeuvre n'était pas tellement facile parce que la poulie à coinceur posée au sol ne voulait bien lâcher son écoute qu'après un vigoureux coup de pied (les poulies marchent mieux placées au niveau du siège; une courte estrope la dégageant un peu serait la bienvenue), Par ailleurs, le taquet destiné à recevoir l'écoute de foc n'est pas, à l'arrière du puits, très commodément placé pour qui veut border vigoureusement ce foc et le tourner.

Le gouvernail a tenu, mais il nous a quelque peu inquiété en se tortillant pour transmettre l'effort de la barre au safran par une série d'articulations élastiques ayant chacune un certain jeu. Il nous semble qu'un ensemble donnant une telle impression de puissance mérite un appareil à gouverner inspirant la même confiance.

Aux allures portantes, le Menhir dont le large tableau traîne un peu dans l'eau remorque des remous impressionnants ; sa progression à bonne vitesse nous a fait supposer qu'ils n'intéressaient que la surface de l'eau. Par brise plus faible, le Menhir n'est certes pas un racer; il nous a néanmoins donné l'impression de marcher au moins aussi bien que ses congénères de même longueur.

Le cockpit est étonnant de confort. Les échancrures des bancs permettent, après avoir déposé les sièges amovibles, de pêcher du bord sans risque de tour de reins ; les coffres sont grands et accueillent facilement moteur, réservoir séparé et beaucoup de petit matériel. De plus, on dispose, le long du tableau, d'un emplacement merveilleux pour loger sans encombre le seau à esches et tout ce qui risque d'avoir un parfum par trop maritime.

Nous critiquerons seulement le fait que le fond du cockpit est trop près de la flottaison pour que le nable traversant le tableau permette de l'assécher complètement à flot, même sans équipage, ce qui sera gênant au retour de certaines parties de pêche aux ormeaux où le bateau se trouvera abondamment maculé de vase et de déchets parfumés.

Ainsi, stable et puissant pour sa taille, rendu insubmersible par des blocs de mousse, très agréable à barrer, malgré son gouvernail " en caoutchouc ", le Menhir nous parait très bien adapté à un programme de pêche et de sorties familiales. Son tirant d'eau, très réduit dérive haute, facilitera beaucoup son utilisation à partir 'd'une grève et permettra de profiter au maximum des marées.

Au vent arrière, le bateau se révèle stable et aussi rapide qu'il est possible de le souhaiter pour sa taille et son programme.

Le vaste cockpit du Menhir est bien fait pour faciliter la manoeuvre, la pêche et... les bains de soleil.